L’Institut de Langue Regina Coeli à Vught

J’ai entendu parler de ce lieu pendant des années, jusqu’à ce mois d’octobre où j’ai eu l’occasion de le découvrir avec deux sœurs Graça et Kim Ngoc. 

Cet après-midi du 16 octobre 2022, nous prenons le train à Paris pour nous rendre à Vught, petite ville du Royaume des Pays-Bas. A notre arrivée, Ellen nous attend. Petite silhouette, chignon argenté, comportement agile, Ellen incarne à sa manière, fidèlement et efficacement, la présence de nos sœurs à Vught. Elle nous conduit à un grand bâtiment moderne où le nom d’ALIX LE CLERC est inscrit à l’entrée. Ce bâtiment de deux étages est construit autour d’un grand préau intérieur de forme rectangulaire et dont le cœur est un grand vitrail magnifiant Mère Alix, Saint Pierre Fourier et les enfants. Espace de détente où l’on peut se reposer, lire, se rencontrer les uns les autres, prendre un café, converser. Les tables et les chaises ainsi qu’une petite bibliothèque sont soigneusement et joliment disposées.

Ellen nous fait monter au premier étage et nous ouvre son appartement. Là, nous découvrons le livre que sœur Annette Heere a écrit avant son décès[1]. Ce livre raconte l’histoire de la Congrégation Notre-Dame à Vught depuis 1903, date de la fondation par les religieuses venues de Lunéville. Contraintes de quitter la France suite à la loi Combes interdisant l’instruction aux ordres religieux, elles s’établissent à Vught où elles construisent un couvent avec un internat d’enseignement secondaire pour les filles : « Regina Coeli ». Au fil du temps, cette école est devenue l’une des premières écoles néerlandaises à intégrer une formation linguistique. En 1996, alors que le nombre de sœurs a beaucoup diminué, le couvent est remplacé par ce bâtiment, destiné à la fois aux sœurs et à des personnes âgées désireuses de loger dans ce cadre convivial et beau.

Du 17 octobre matin au  21 octobre soir, nous avons baigné dans un cadre conjuguant « high tech » et esthétisme, conçu pour que les étudiants pratiquent quasi naturellement la langue que chacun a choisie d’apprendre.

L’Institut s’occupe de tout : cours particuliers, activités de groupe, laboratoire de langues, bibliothèque, repas délicieux, chambres impeccables, et même sport et détente… Du jardin à l’intérieur du bâtiment, les preuves de vie de l’Institut créé par les  religieuses sont là : outre les statues et tableaux de Saint Pierre Fourier et de Mère Alix, un coin de la salle d’accueil est dédié à l’exposition de photos, d’articles, d’objets divers, d’antiquités… qui exprime la présence et l’engagement des soeurs à Vught, en particulier à l’Institut Regina Coeli.

Ellen, tel un témoin vivant, a profité de tous les moments possibles pour venir nous chercher et nous montrer d’autres traces historiques de nos sœurs dans ce quartier : une école pour les enfants sourds, une école maternelle et primaire…

La caractéristique de la méthode à Regina Coeli c’est le programme personnalisé pour chaque étudiant. Je vous partage ma propre expérience.

  • Trois mois avant le séjour, j’ai été invitée par mail à consulter le site de l’Institut et à répondre à un questionnaire préparant un entretien téléphonique entre un professeur et moi. L’Institut m’a laissé choisir la date de cet entretien dont les objectifs étaient de faire connaissance, d’établir mon niveau de compétence linguistique, de déterminer mes objectifs et de concevoir mon programme personnel.
  • Pendant la semaine d’internat à l’Institut, j’ai eu quatre cours quotidiens avec quatre professeurs différents. Entre les cours, je faisais les exercices de mes quatre cours dans le laboratoire de langues. En plus, il y a eu deux activités de groupe dirigées par deux autres professeurs, et deux dîners avec deux autres professeurs.
  • Apres mon retour en France, l’Institut m’a envoyé un mail me demandant de faire l’évaluation de ce séjour.

Cette semaine a été très « pleine », dure même, mais cela valait la peine ! J’ai beaucoup travaillé mais toujours avec enthousiasme et joie, car le programme répondait à mes attentes. Cette méthode m’a vraiment motivé à profiter de tous les moyens possibles pour améliorer mon français.

Mais ma plus grande surprise a été de découvrir que cette méthode a été créée dès le début du XXe par les sœurs de notre Congrégation à Vught ! En effet, elles ont expérimenté que le moyen le plus rapide d’apprendre une langue était de concevoir un programme capable de répondre entièrement au besoin de l’étudiant, selon sa manière et ses propres objectifs. Elles ont aussi estimé fondamental de créer un environnement d’apprentissage agréable dans lequel l’étudiant peut se centrer au maximum sur son processus d’apprentissage en pratiquant toujours et partout la langue choisie, avec ses professeurs et avec tous ceux qu’il rencontre. Tout ceci exige des éducateurs constamment attentifs aux besoins réels de chaque élève et y répondant à la fois intellectuellement et spirituellement.

J’ai été très touchée, en parlant avec des professeurs, des employés, des camarades venus de différents pays, de sentir la présence de notre Congrégation : comme si la pédagogie et l’esprit de nos sœurs étaient profondément enracinés dans ce lieu.

« Une fois vue vaut mieux que cent fois entendues ». Cette semaine nous a laissé une gratitude et une admiration. La gratitude vis-à-vis de nos aînées dont le dévouement, l’hospitalité et l’intérêt pour les autres ont montré la vitalité de la mission éducative.  L’admiration pour l’Institut Regina Coeli qui entretient et développe ces valeurs précieuses. Un beau témoignage pour nous aujourd’hui, les jeunes générations de la Congrégation !

Thu Phuong


[1] Annette Heere, dernière sœur de la Congrégation aux Pays-Bas,  est décédée le 7 août 2019, laissant « L’histoire des Religieuses à Vught « (2017)