Hélène Marty

Hélène Marty

14-09-0927 – 21-11-2019

Version française

Très discrètement, dans la simplicité, tu nous as quittés le jour de la fête de la Présentation de Marie au Temple, joignant ton « oui » au sien comme tu as tâché de le faire tout au long de ta vie.
Aujourd’hui, tu es entourée, non seulement de ta famille, de ta communauté, mais aussi de toutes les sœurs de ta congrégation, spécialement celles du Vietnam, de tes nombreux amis qui sont présents par la pensée pour rendre grâce à Dieu, avec nous, pour toutes les merveilles que le Seigneur a faites en toi.

Tu es née le 14 septembre 1927 à Vinh au Vietnam, où ton père était administrateur avec de hautes fonctions publiques et politiques dans ce pays. Troisième de 4 enfants, tu as suivi tes classes primaires à l’école publique d’Hanoï, la capitale. Puis, tu es entrée en 6ème aux Oiseaux : la première élève inscrite dans cette école du Rosaire, que les mères de la congrégation ND venaient d’ouvrir. Lorsque ton père eut atteint l’âge de la retraite, la guerre avec le Japon sévissant, toute la famille descendit à Dalat où tu as pu continuer tes études à ND du Lang Biang jusqu’au baccalauréat, malgré une situation dangereuse : ton père a été fait prisonnier par les Japonais…
Après 1940, durant le régime de Vichy, ordre est donné à ton père de quitter le Vietnam… Vous êtes revenus en France dans des conditions difficiles ! La famille s’installe dans le Lot tandis que tu loges à Paris chez une tante. Là, tu entreprends à la Sorbonne une licence de lettres classiques. Au cours de tes études, tu suis, sur l’invitation de sr M. Noëlle Monteil, plusieurs retraites destinées aux anciennes élèves à Verneuil. Prenant conscience d’un appel à la vie religieuse, tu entres au noviciat de Verneuil le 8 septembre 1950, tu y fais profession en 1952 et tu commences ta longue carrière d’enseignante dans les classes de 2de et 1ère.

En 1958, le décès au Vietnam d’une sœur qui enseignait le français, a provoqué ton retour en ce pays. C’est ainsi que tu te retrouves à ND du Lang Biang à Dalat avec la charge des classes de 2de et 1ère. Tes anciennes élèves ont apprécié ton ouverture, ton attention pour les élèves en difficulté, ta patience : jamais tu ne te fâchais, juste « les gros yeux » quand il le fallait ! » Aussitôt arrivée, pour être plus proche de tes élèves, tu as consacré beaucoup de temps à l’apprentissage de la langue vietnamienne. C’est ainsi que, par la suite, donner des conférences en vietnamien ne te faisait pas peur !

De 1968 à 1976, on te retrouve à Saïgon à l’école Regina Mundi où tu continues l’enseignement du français. Mais le Concile étant passé par là, tu apprends qu’en France se généralise la création de petites fraternités pour plus de proximité avec la population.
Aussitôt, avec sr M. Joseph et sr M.Gioan vous décidez de vous installer dans un quartier pauvre de la périphérie de Saïgon, vous permettant d’avoir en plus du travail à l’école, des activités sociales comme une bibliothèque de rue. C’est ainsi : ton sens de la justice, ton amour des plus pauvres te rendirent créative et audacieuse.

A cette époque, dans tout le pays, la guerre faisait rage entre le nord et le sud. La guerre se termine en 1975 avec la victoire des communistes. Ce fut alors le grand exode de nombre de familles vers l’occident. Au pays, les écoles privées changent de statut. ND du Lang Biang passe aux mains d’une femme, choisie par le parti pour son héroïsme pendant la guerre. Elle soumet les quelques professeurs restants, dont toi, à une longue session de rééducation politique. Quelques semaines plus tard ce fut l’expulsion vers l’Europe. « Je ne suis pas partie du Vietnam, on m’en a chassée ! » disais-tu, souffrant d’avoir abandonné de force tes sœurs au plus sombre de leurs difficultés…

De 1976 à 1978, l’Abbaye t’accueille. Tournée vers l’avenir, sans oublier le passé, tu travailles au Secours Catholique à la porte de Choisy, donnant des cours de français aux réfugiés.
Et voici qu’en 1978, un nouvel appel est venu de Hong Kong : sr Jacqueline Thérèse demande de l’aide pour accueillir 2 jeunes désirant entrer dans la vie religieuse. Pour assurer leur accompagnement, après un séjour linguistique à Londres, te voilà donc repartie vers l’Asie. Tu y restes plus longtemps que prévu : les réfugiés du Vietnam arrivaient en masse. Il fallut, sur ce petit bout de territoire, improviser des camps de fortune. Tu te proposes en tant que bénévole et, avec une dame chinoise et des volontaires, tu organises pour les enfants des classes élémentaires d’anglais et des jeux. Généreuse, vivant dans le camp au même régime que tout le monde, ta santé se dégrade et tu repars en France en 1981.

Oublieuse de toi-même, rebondissant sans cesse face aux événements, tu rejoins sr Isabelle-Marie Brault et sr M. Madeleine Andrade pour fonder une fraternité aux Grands-Champs, dans un quartier populaire du XXe arrondissement. Pour y faire quoi ?!…
Passionnée par la Bible, tu optes pour un recyclage biblique : cours à l’Institut catholique, sessions à l’école de la Foi à Fribourg avec le père Loew. Tu étais prête à créer des petits groupes de Bible, soutenue et encouragée par le curé de la paroisse St Gabriel. Ce que tu fis. Après la formation de 3 équipes, tu fais appel à des personnes intéressées pour en animer d’autres. Le Père Mase Calo, ami du Père Loew, venait régulièrement pour animer des sessions bibliques.
Parallèlement, tu crées les dimanches d’amitié, pour palier à la solitude de beaucoup de personnes ressentant ce jour-là plus particulièrement ennui et tristesse.

Ta présence dans le XXe s’est achevée en 2008.
C’est en février que la communauté de l’Abbaye t’accueille définitivement.
Très consciente de la maladie d’Alzheimer qui se déclare, tu l’acceptes, jour après jour avec sérénité, luttant de toute la force de ton caractère pour rester le plus possible autonome. Oui, Hélène, tu étais d’un caractère exceptionnellement fort et tenace, rien ne pouvait te faire dévier de tes objectifs ; en même temps, humble, effacée, nous admirions ta douceur, ta joie de vivre, tu avais plein d’humour, tu aimais rire, jouer. Tu as été une délicieuse compagne pour nous.
Jusqu’à la fin, tu as puisé dans la prière et les Ecritures la foi, l’Espérance et la charité qui t’animaient.

Dans le livre de Sirac le Sage il est écrit :
« Mon fils, accomplis toute chose dans l’humilité, et tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur.
Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser :
Tu trouveras grâce devant le Seigneur. »
Cette parole n’est-elle pas le reflet de ce que tu as essayé de vivre ta vie durant ?
Le Seigneur a fait pour toi des merveilles, rendons-lui grâce !

English Version

Hélène died on the feast of the Presentation, without any fuss, simply saying “yes” to God as she always did. All those who knew her, her family, her sisters, especially those from Vietnam, and her friends, thank God for his gifts to her.
She was born in Vietnam on 14th September 1927, as her father had an administrative job there. Her primary education took place in Hanoi, then she joined Les Oiseaux as the first pupil in the “Rosaire”, their new school. When her father retired the family went to Dalat, but the situation was dangerous, it was wartime and he was imprisoned by the Japanese.
After 1940, during the Vichy regime, they returned to France in spite of the difficult conditions. They lived in the region of the Lot, but Hélène lived with an aunt in Paris, where she studied Classics at the Sorbonne. She took part in several retreats for former pupils of Verneuil on the initiative of Sr. Nicole Monteil, where she felt the call to Religious Life, and entered at Verneuil on 8th September 1950. She made her first Profession in 1952, and began her teaching career. In 1958 she returned to Vietnam, to Dalat, to teach French. Her pupils appreciated her patience and the extra care she gave to children experiencing difficulty. She never lost her temper, a look was enough! She learnt Vietnamese and could even give lectures in the language.
She spent from 1968 to 1976 at Regina Mundi in Saigon where she continued to teach French. When the General Council visited, she discovered that in France smaller communities had been created to enable sisters to live among other people.
In consequence she moved to a poor area on the outskirts of Saigon with Sr. M. Joseph and Sr. M. Gioan. This enabled her apostolic scope to include not just teaching, but running a “street library”, inspired by her love of justice and of the poor.
At that time the war between the north and the south was at its most brutal, it ended in 1975 with victory for the communists. Many families returned to the west, and the government of the schools changed. Notre Dame du Lang Biang, where she was teaching, fell into the hands of a woman chosen for her heroism during the war. The teachers had to undergo political re-education, but then they were expelled and had to return to Europe: “I did not leave Vietnam, they threw me out” she used to say, but it cost her dear to have to leave the Vietnamese sisters to such a dark future.
From 1976 to 1978 she went to the Abbaye. She worked with Secours Catholique at the Porte de Choisy, teaching French to refugees.
In 1978 Sr. Jacqueline Thérèse in Hong Kong asked for help as two young people wanted to join her. She came to London to follow a course in English and then left for Asia again. She stayed longer than planned as there was a vast influx of refugees from Vietnam, and temporary camps had to be set up. She joined a group run by a Chinese lady as a volunteer, and organised classes for children in English, as well as supervising playtime. As she lived in the camp in the same conditions as everyone else, her health deteriorated and she returned to France in 1981.
She joined Sr. Isabelle Marie Brault and Sr. Madeleine Andrade in a fraternity in Grands Champs, a poor district in the 20th arrondissement. There she followed a course in Bible studies, subsequently running Bible groups, encouraged by the local Parish Priest. At the same time, she organised “Friendship Sundays” to alleviate depression and boredom among the local people.
She left there in 2008 and joined the Community at the Abbaye.
She was aware that she had Alzheimer’s, accepting it serenely but at the same time struggling to stay independent. She was exceptionally strong and tenacious, yet at the same time was humble, full of joie de vivre and humour. The other sisters found her a delightful companion. Inspired by the Scriptures and strengthened by prayer she lived by faith, hope and charity.

“The humble find favour with the Lord”.

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